Un exemple d’adaptation réussie : Vuillermoz Philippe SA
En cette fin d’année, Machines Production propose d’examiner de près les raisons de faire confiance à l’industrie française pour croître et se développer. La rédaction est allé en chercher une excellente à Saint-Claude, dans le Jura, dans une PMI de sous-traitance. A lire attentivement.
Philippe Vuillermoz, outilleur mouliste de métier, a créé son entreprise avec un compagnon en 1993. Leurs deux machines d’occasion d’origine ont été rejointes par un centre à commande numérique dès 1994. Depuis, une machine-outil CNC est entré dans l’atelier chaque année, afin de répondre à la demande en soustraitance de moules, principalement commandés par les secteurs téléphonie et automobile. Et puis, un lundi de 1999, tout s’effondre. « Le vendredi à 17h, nous avions 6 mois de travail devant nous, » explique Philippe Vuillermoz. « Le lundi suivant à 11h, nous n’avions plus rien en commande ! » Dit-il. La crise de la téléphonie est passée par là. Cet électrochoc, finalement, a été salutaire. Ne dit-on pas que tout ce qui ne fait pas mourir peut renforcer ? Encore faut-il réagir correctement.
Réflexion collective pour stratégie très personnelle
Dans ces difficultés, Philippe Vuillermoz se tourne vers le syndicat de la plasturgie de Franche-Comté, aujourd’hui intégré au pôle de plasturgie Plastipolis. « Avec eux, nous avons compris la nécessité vitale de diversifier notre activité. Avec eux aussi, nous avons pu déterminer les secteurs les plus porteurs d’un nouveau développement, en fonction de notre savoir-faire de l’époque, » explique-t-il. Philippe Vuillermoz définit alors une véritable stratégie commerciale et technique, faite d’investissement et de formation permanente. L’investissement atteint 20% du CA en moyenne. Il concerne des machines-outils de dernière génération, de plus en plus précises. Les bâtiments ont été concernés également, avec un atelier neuf entièrement climatisé. Le contrôle fait aussi partie des priorités avec un laboratoire contrôlé thermiquement et hygrométriquement, certifié BNM et un équipement en vidéo laser 3D du plus haut niveau. « En dix ans, nous avons divisé les tolérances par dix » affirme Philippe Vuillermoz, « pour atteindre une précision micrométrique aujourd’- hui. »
CGTech appelé à la rescousse
« Comme en 99 à propos de notre dépendance par rapport au secteur de la téléphonie, cette collision nous a fait dire « plus jamais çà !! » Explique Philippe Vuillermoz. L’entrepreneur se met alors en quête d’un logiciel permettant de simuler réellement les opérations d’usinage les plus complexes, en dehors de la machine. Thierry Jammes, familier de la société et technico-commercial chez CGTech apporte une telle sécurité avec le logiciel VERICUT V7. Après quelques tests d’usage, l’investissement est fait pour moins de 15 k€. Dans un premier temps, la simulation n’est assurée que pour le centre d’usinage 5 axes. « Une formation CGTech de deux jours sur site, ont permis aux professionnels concernés de maîtriser parfaitement le logiciel, » confirme Philippe Vuillermoz. Tout l’environnement machine est rentré sur les logiciels de programmation Visi de Vero Software, Delcam ou sur VERICUT. Un dialogue efficace entre ces divers logiciels assure la transmission des données sans encombre. La simulation de l’ensemble des phases d’usinage est désormais effectuée au préalable sur poste séparé, pendant que le centre travaille de manière autonome. Les bruts sont montés sur l’une des 60 palettes Erowa disponibles en magasin du robot, après un préréglage éventuel de balancement sur MMT 3D de la même marque. Les 60 outils, dont la plupart possède leur jumeau, sont préréglés et les corrections d’outils sont intégrées en amont. « Sur le centre d’usinage, la mesure d’outil est systématiquement effectuée avant toute opération, » explique Philippe Vuillermoz.
Par contre, la mesure des pièces est faite en dehors de la machine, afin de ne pas immobiliser le centre. De toute façon, vu la taille des pièces, celles-ci sont bonnes ou mauvaises, jamais reprises. « Depuis que nous avons mis en oeuvre VERICUT, nous n’avons plus jamais eu de collision et notre TRS a augmenté de manière importante, » affirme Philippe Vuillermoz. Outre la rentabilité de l’investissement, le logiciel tranquillise aussi les compagnons. Ils peuvent appuyer sur le bouton start du centre 5 axes chaque soir et le vendredi en toute confiance. Aujourd’hui, l’entreprise se prépare à étendre l’utilisation de VERICUT à toutes les machines, en achetant les licences adéquates pour le tournage et l’électroérosion.
Une réputation construite sur les salons de référence
Aujourd’hui, le résultat est là : Avec dix personnes, l’entreprise réalise 1 M€, exporte 80% de sa production, agit sur trois métiers avec plus de 50 clients actifs. Car le savoir-faire de Vuillermoz SA a évolué vers les métiers de mouliste pour micro-moules d’injection plastique, d’outilleur fabricant de microoutils suisse de découpe et de soustraitant pour la fabrication de pièces très précises à l’unité et jusqu’à 10 000 pièces. Ces activités ayant en commun la précision micrométrique de réalisation, Vuillermoz est consulté par ses clients de l’horlogerie ou du médical dès que l’impossible doit être atteint. « Nous avons trouvé nos clients actuels sur les salons Micronora à Besançon et EPHJ-EPMT à Lausanne, » explique Philippe Vuillermoz. « Ce sont les salons de référence pour les professionnels de la précision allemands, suisses et français, tous secteurs confondus, » affirme-t-il. C’est aussi lors de ces salons que l’entreprise Vuillermoz montre son savoirfaire. Il est avant tout fait des compétences d’hommes et de femmes qui ont su évoluer dans leur métier avec les bons outils, les bonnes machines et les bons logiciels. Grâce à 20% d’investissement par an.
L’organisation du travail a été également modifiée en profondeur. Chaque compagnon passe maître de tout son travail, partant de la programmation jusqu’à la préparation des tâches sur machines CNC entièrement automatisées. La plupart sont alimentées par robots Erowa, leur permettant de travailler la nuit et le weekend. « Nous obtenons un taux de rendement synthétique de 650h/mois sur les machines EDM à fil. Sur le centre 5 axes continu, nous sommes aujourd’hui à 300 h/mois et voulons atteindre 500 h/mois », affirme Philippe Vuillermoz. Mais cette organisation ne va pas sans risque. Suite à une collision qui a coûté 135k€ à l’entreprise en 2008, celle-ci a décidé de se doter des moyens d’éviter ce genre d’accident.